D’orient en occident, du jazz au rock, via la chanson. Votre identité musicale est métissée ?
Alors oui effectivement j’aime bien métisser les choses. Mélanger avec mes invités, mes styles, etc. C’est une couleur que je défends dans tout ce que je fais. Mais je ça n’est pas exprès dans le sens où je ne calcule pas les rencontres et les métissages. J’aime dire que j’appartiens à une époque où les métissages sont présents partout, qu’ils soient intergénérationnels, culturels, culinaires, toutes sortes de métissages. Pour appartenir à notre époque c’est logique que ma musique soit également dans cette même dynamique.
Un César, des Victoires de la musique, des nominations aux Grammy Awards. C’est votre style qui resonne avec le public ?
Il faut croire ! Parce que quand j’ai démarré, toutes les personnes importantes de l’industrie et des médias me disaient que réussir à faire ce métier en jouant de la trompette allait être impossible. On m’a dit que ma musique ne plairait à personne. Un jour on m’a même dit « Ibrahim, ta musique va rester dans les cartons ». Mais voila, en travaillant beaucoup, en étant en dehors des majors, je me suis trouvé un public qui adhère.
Vous venez à Lourdes avec Kalthoum. Comment passer de la chanson arabe au live de jazz ?
C’était un véritable défi au départ. Reprendre une des plus grandes chansons de Oum Kalthoum, grande diva qu’on considère comme le plus grand monument de la culture musicale arabe et en faire une musique qu’on pourrait presque assimiler un standard de jazz. J’ai l’impression qu’on a réussi à le faire quand je vois dans le monde entier des jeunes et des moins jeunes reprendre cette version de la chanson. Je me dis qu’on a réussi quelque chose de fou : unir cette chanson qui est la plus représentative de la culture arabe et le jazz qui est la musique classique américaine. Avec Kalthoum, tout ce qu’il y a de plus classique et de plus traditionnel des deux cultures partagent exactement les mêmes mélodies. C’est juste qu’on les habille différemment. On arrive à prouve qu’on partage les mêmes valeurs. On les vit simplement un peu différemment.
C’est avec ce projet que vous serez sur scène tout à l’heure !
Oui, c’est ce qui en fait un concert assez particulier. J’avais monté ce projet à l’occasion du 40e anniversaire de la disparition de Oum Kalthoum, pour faire la jonction entre la culture arable et la culture occidentale à un moment ou les tensions devenaient fortes. C’est ma façon d’essayer d’apaiser un peu les choses. Mais quelques mois plus tard, il y a eu les attentats et tout s’est effondré, j’avais l’impression d’avoir fait tout ça pour rien. On a fait une tournée extraordinaire dans le monde entier. mais ça à quand même laissé un goût amer. Alors 10 ans plus tard, j’ai remonté cette petite tournée pour le 50è anniversaire avec une trentaine de dates pour faire revivre ce projet et redonner un peu d’espoir car rien ne s’est apaisé depuis. Voilà donc c’est pour ça qu’on est à Lourdes aujourd’hui, c’est pour ça que je suis très heureux de présenter ce programme ici.




